Discussions sarajévites

Je me retrouve seul ce matin, les enfants et Fabienne sont partis déjeuner et j’attends que nos voisins espagnols se réveillent pour dégager notre voiture. Notre logeur part, il a un travail d’électricien (son vrai métier) à faire et me laisse sous la garde de Saalem, charmant bosniaque né à Alger en 1978, ayant habité un peu partout en Afrique francophone avant de faire un master de chimie dans une université de banlieue parisienne - assez critique d’ailleurs par rapport à l’accueil parisien des non-chrétiens. On discute le bout de gras, c’est une personne intelligente qui sait parler et aussi écouter (rare). Gag parisien placé ironiquement: “qu’est-ce qui distingue l’homme de l’animal? La Méditerrannée”.

Trop jeune pour se marier et s’installer dans sa famille, dans son quartier, à Sarajevo, il songe à prendre un job pour une compagnie pétrolière slovène, qui lui permettrait de continuer à voyager, car il a un peu le virus du perpétuel expat.

Lui: “Pourquoi la Bulgarie et la Roumanie sont-ils membres de l’UE et pas la Bosnie?” Moi: “Sans doute parce que ce sont des Etats faibles plus faciles à contrôler (mais en réalité je pense plutôt: parce qu’il y a eu la guerre et qu’il est impensable pour un Etat de l’UE de connaître potentiellement un conflit)”.

Il m’explique aussi les problèmes de débouché maritime de la Bosnie, qui s’est vu confisquer son port hauturier (Ploce) par la Croatie et doit se contenter d’un port moins profond, Neum, dans son “corridor de Danzig” de quelques kilomètres de large. La Croatie, ayant une enclave au sud de ce corridor, a un projet de pont depuis le nord jusqu’à la presqu’île de Peljesac, qui lui permettrait d’avoir une continuité territoriale. La Bosnie s’inquiète de la hauteur du pont, qui devra être suffisante pour laisser passer les bateaux se rendant à Neum, et des incidences des travaux sur le traffic maritime.

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